Problématique de l'assassinat politique
Violette Daguerre
Depuis la nuit des
temps, le meurtre politique est l'un des moyens de se débarrasser d'un
adversaire politique devenu dangereux. C'est l'une des expressions de
l'assassinat extra judiciaire qui n'en demeure pas moins une violation grave
des droits de l'homme condamnée par les différentes religions et philosophies. La
déclaration universelle des droits de l'homme de 1948 n'est qu'une déclaration
de principes, et il a fallu attendre le pacte pour les droits civiques et
politiques de 1966 pour condamner toute forme d'atteinte aux droits à la vie
dans un cadre extrajudiciaire. Tandis qu'en Europe un protocole annexe à la
Convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales
interdit toute forme d'atteinte à la vie des humains y compris la peine
capitale.
La problématique qui
ressort du débat sur l’assassinat politique c'est que du point de vue de son
auteur, l’assassinat politique est légitimé, rendant ainsi relatifs certains actes
que nous jugeons par-dessus tout abominables et condamnables. D'aucuns pensent
qu'il ne s'agit pas d'"assassinat" lorsqu'on prend pour cible un
combattant engagé dans des hostilités armées. Et c'est d'autant plus légitimé aujourd'hui
qu'au nom de combattre le terrorisme on se permet d'attenter à la vie de
l'autre sans coup férir.
Mais ce qui est
considéré par les uns – par exemple en Israël - comme une "attaque ciblée contre des combattants
ennemis désignés", est dénoncé de l'autre côté, par les Palestiniens qui
parlent eux d'une politique
d'assassinats, et "d'exécutions illégales", partant su principe qu'il
s'agit d'une force d'occupation et d'une résistance à cette occupation. Ainsi,
ce que l’on croit impensable devient tragiquement possible et justifié par les
tenants du pouvoir et des rapports de force sur le terrain.
Si la guerre est un acte
de violence destiné à contraindre l’adversaire à exécuter notre volonté, il
n'en reste pas moins que lorsque le mobile n'est pas militaire il est en tout
cas politique. Par conséquent, l'objectif reste le même, même si le moyen
change. De toute manière, il s'agit de soumettre l'opposant aux politiques
menées par celui qui dispose du pouvoir, et le crime reste l'un de ces moyens.
Le recours systématique
à l'assassinat ciblé contre les mouvements de libération, au Moyen-Orient par
exemple, a modifié le cours de l'histoire d'un certain nombre de pays et
profondément affecté les politiques régionales. La pratique de l'assassinat
ciblé n'a fait qu'affaiblir et saper les mouvements de libération. Le Liban à
lui seul est un parfait exemple en la matière.
Ainsi, la cible
assassinée est nécessairement une personne de premier plan, jouissant d'un poids
sur la scène politique. La finalité de son choix est de servir de leçon pour
quiconque oserait en prendre un exemple. Ainsi, on donne le signal aux autres
qu'il faut qu'ils se réduisent au silence. Car la peur de devenir soi même une
cible potentielle au régime au pouvoir, fait que l'on devienne imperméable aux
idéaux véhiculés par cette minorité de résistants et que l'on dénonce leurs
actes.
Culpabiliser et
terroriser celui qui oserait se rebeller, briser les soutiens que l'opposant
est susceptible de trouver parmi la population semble justifier ces formes
d'exactions qu'elles soient judiciaires ou extrajudiciaires.
Pour conclure, il me
reste à dire, pour finir sur une note d'espoir, que l'on s'achemine de toute
évidence, par les différentes luttes menées ici et là, à exercer sur ces
pouvoirs un contre pouvoir de plus en plus grandissant. A leur signifier qu'on finira
par faire échec à la banalisation et à l'impunité de l'assassinat politique et
du terrorisme d'Etat.
A assassinats politiques
la réponse ne peut qu'être "Travail de justice et de vérité" et l'on
finira par y arriver même si les chemins parcourus semblent encore quelque peu
tortueux.
23-04-2006