La trêve conclue entre Israël et le Hamas n’aura
pas duré longtemps.
Sans préjuger de l’ampleur des combats à venir
et leurs dégâts, la situation est déjà
catastrophique.
Mettre fin au blocus pour pouvoir reconstruire
Il y a à la fois un problème de ravitaillement
d'urgence et de reconstruction pour Gaza. Près de
2000 morts, 10.000 blessés dont de
nombreux resteront mutilés à vie, environ
300.000 déplacés, le bilan est lourd.
Nourriture, alimentation en eau et électricité,
hébergement soins médicaux, tout manque. En
temps normal, c'est déjà un défi majeur que de
fournir ces éléments à une population qui en a
désespérément besoin, mais si le blocus est
maintenu c’est mission impossible. Il faudra
donc y mettre fin.
La reconstruction de Gaza est déjà évaluée à ce
jour entre
4 et 6 milliards de dollars. Il est
peu probable qu'Israël, responsable de ces
destructions en paie, fût-ce partiellement, le
prix. C'est donc probablement le reste de la
communauté internationale qui sera appelée à
régler la facture, comme une sorte de pénalité à
son impuissance volontaire de mettre fin aux
bombardements.
Mais, là encore, cet immense effort ne sera pas
possible si le blocus est maintenu. On dit
souvent que la Palestine est l'un des
territoires qui reçoit l'aide internationale la
plus importante par habitant. Mais ce n'est
qu'une maigre compensation par rapport à
l'impossibilité de disposer d'un État libre. Si
les Palestiniens pouvaient produire, exporter,
circuler librement, ils n'auraient pas besoin
d'aide internationale.
Il faut négocier avec le Hamas
Le problème est qu'Israël ne voudra certainement
pas y mettre fin, sauf à accorder une victoire
politique au Hamas.
La solution consisterait à obtenir une garantie
de l’arrêt des tirs de roquettes en échange de
la fin du blocus. Il pourrait être garanti par
une force d'interposition internationale. Les
tirs de roquettes n'ont quasiment pas d'effets
militaires et ils sont politiquement et
stratégiquement désastreux. Ils ont largement
fédéré la population israélienne autour de
Netanyahou, contribué à affaiblir le camp de la
paix en Israël et renforcé les partisans des
solutions de force.
Le Hamas s’est renforcé au détriment de
l'Autorité palestinienne. Contrairement au
calcul israélien, la population de Gaza ne rend
pas le Hamas responsable de ses souffrances.
Depuis 2006, les Occidentaux refusent de parler
au Hamas parce qu'ils l’ont inscrit à la demande
d’Israël sur
la liste des organisations terroristes.
Même si l'on peut critiquer la politique de tir
de roquettes du Hamas, il faut se rendre à une
évidence : on ne choisit pas son interlocuteur.
Il faut négocier avec ceux qui comptent et le
Hamas compte aux yeux des Palestiniens. Ce n'est
pas en ignorant cette réalité que l'on avancera.
C’est de surcroît hypocrite car il y a des
contacts officieux, y compris entre Israël et le
Hamas.
Refuser de négocier avec le Hamas c’est refuser
de vouloir parvenir à un résultat.
Les perdants, bien plus nombreux que les
gagnants
Quels sont les gagnants et les perdants de cette
crise ? Les seconds sont les plus nombreux.
En tout premier lieu bien sûr, la population de
Gaza. Il y a de nombreux exemples de
bombardement de populations civiles bien que
cela heurte de plus en plus les consciences. Il
est rarissime de voir une population soumise à
un blocus être bombardée. Où peut-elle fuir ?
Israël a remporté une victoire militaire (il ne
pouvait en être autrement du fait de la
disproportion des forces) mais a largement perdu
la bataille de l'opinion. Certes, comme déjà
dans le passé les pays occidentaux ont laissé
faire avant de réagir, et encore, de façon très
modérée. Mais l'opposition à la politique
israélienne est devenue forte dans tous les pays
occidentaux y compris les plus proches de
Tel-Aviv.
Par ailleurs, des pays latino-américains n'ont
pas hésité à prendre des sanctions contre
Israël. Il est probable que la campagne de Boycott
sanction des investissements (BDS) va
reprendre de plus belle si Israël ne change pas
de cap.
Les occidentaux ont montré leur impuissance
Le problème est que la quasi-totalité des juifs
israéliens ont soutenu les bombardements. La
population israélienne s'est radicalisée et
l'hostilité, parfois même la haine, des
Palestiniens s’est renforcée.
Divisés, les pays arabes ont été marginalisés.
Les pays occidentaux, dont certains ont encore
l'illusion de pouvoir diriger le monde, ont
montré leur impuissance. Ils ont assisté en
spectateurs aux événements sans pouvoir peser
sur eux. On ne peut que remarquer la rapidité
avec laquelle ils prennent des sanctions contre
la Russie et leur incapacité à le faire face à
Israël, qui estime donc avoir les mains libres.
De ce fait, les occidentaux apparaissent moins
puissants et de surcroît, leur crédit moral
s'est dévalué.
Si un accord politique global n'est pas conclu,
les trêves ne seront que des trêves,
c'est-à-dire une interruption des combats qui
reprendront tôt ou tard, comme en 2009 et 2012.
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