COMMISSION ARABE DES DROITS HUMAINS

Arab Commission for Human Rights
5, rue Gambetta
92240-Malakoff- France
Tel 0033140921588 Fax 0033146541913

e. mail achr@noos.fr

International NGO in special Consultative Status with the Economic and Social Council of the United Nations

English

عربي

2009-01-06

La guerre sert de prétexte pour écraser les Arabes en Israël  - Eilat Maoz et Fadi Shabita

 

 

Des militants sont arrêtés, la police dénature les faits et les dirigeants politiques autorisent une persécution politique. Israël profite de l’offensive militaire pour opprimer ses citoyens palestiniens.

Ces derniers jours, depuis qu’ont débuté les manifestations de protestation contre l’offensive israélienne à Gaza, nous sommes témoins d’un renforcement de l’oppression violente et de la persécution politique des Palestiniens citoyens d’Israël. Ces mesures sont la réalisation concrète et violente des déclarations enflammées de hauts dirigeants politiques qui ont parlé, ces derniers jours, du « danger de l’intérieur », du « Hamas qui est parmi nous » et de « cinquième colonne », préparant ainsi le terrain à la persécution politique.

Depuis samedi, jour où les avions de l’armée israélienne ont commencé à bombarder Gaza, des centaines de militants, jeunes pour la plupart, ont été arrêtés et des dizaines d’entre eux n’ont toujours pas été libérés. Parallèlement, les leaders de tous les courants politiques palestiniens ont été convoqués pour interrogatoire. A Jaffa, par exemple, on a emmené de chez eux, hier, dix militants et militantes pour des interrogatoires par la Sûreté Générale (Shabak) et la police, à la suite d’une manifestation organisée lundi dans la ville contre la guerre, manifestation qui avait rassemblé de nombreux participants. Les militants ont été interrogés sous les motifs d’incitation au terrorisme, jets de pierres et négation de l’existence de l’Etat d’Israël. Des journalistes arabes qui avaient donné des comptes rendus des manifestations ont été arrêtés, eux aussi, et d’autres ont été frappés. Des manifestations non violentes et qui avaient été autorisées par la police – dans des localités palestiniennes, dans des villes mixtes et des universités – se sont heurtées à une violence policière inexplicable et brutale. En plus de l’oppression institutionnelle, nous assistons à une augmentation de la violence raciste à l’encontre des manifestants et des citoyens palestiniens. C’est ainsi, par exemple, qu’une femme de 65 ans, habitant Jaffa, et portant le foulard, a été agressée dans un autobus par les autres voyageurs et expulsée du bus par le chauffeur.

Oppression violente et persécution politique

Dans leur majorité, les médias arabes [israéliens] apportent leur contribution à cette incitation continue et à la création d’une ambiance d’intimidation et de réduction au silence, et s’alimentent essentiellement de rapports provenant de la police elle-même. Un leitmotiv revient dans tous les articles : manifestations d’Arabes et de militants de gauche (comme si des Arabes ne pouvaient pas être des militants de gauche), brandissant le drapeau de l’OLP (pour que la population israélienne en revienne à la terminologie des années 80), tous des émeutiers arabes (presque toujours du nord du pays) qui n’obtempèrent pas aux demandes de la police, contrainte dès lor, de les disperser par la force. En même temps, les médias passent presque totalement sous silence l’opposition de Juifs [israéliens] à cette guerre. L’impression est ainsi créée que la seule opposition à la guerre est palestinienne, autrement dit « génétique » et non pas politique, du genre donc à mettre en danger la sécurité de la population. Les médias contribuent à essayer de créer une atmosphère d’ « Intifada de l’intérieur » qui permettrait à la police de frapper les manifestants – des manifestants et des militants palestiniens, principalement.

La coalition contre la guerre à Gaza, comptant plus de 20 mouvements et organisations arabes et juives, a introduit aujourd’hui une requête en urgence auprès de la Cour suprême, suite à la décision prise par la police de ne pas autoriser la coalition à organiser une manifestation de masse à Tel Aviv, samedi soir prochain. La police mettait pour condition à l’octroi de l’autorisation que les organisateurs de la marche s’engagent à ce que les manifestants ne brandissent pas de drapeaux palestiniens. Il est évident pour tout le monde que cette mesure inexplicable et illégale de la police nous ramène aux temps sombres où soutenir la création d’un Etat palestinien et demander la fin de l’occupation étaient une position jugée illégitime et illégale. Chut ! Pas un mot sur le drapeau de l’Autorité Palestinienne qui flotte même sur le Ministère du Premier Ministre, quand Abou Mazen et d’autres hauts responsables de l’Autorité Palestinienne s’y rendent en visite.

Sont-ce là les leçons que l’on a tiré des événements d’octobre [2000] ? Une ambiance publique menaçante à côté d’une réduction au silence des protestations, d’une oppression violente et d’une persécution politique – autant de signes d’un fascisme qui va croissant et qui doit mener à une catastrophe. Si les citoyens palestiniens d’Israël n’ont pas le droit de protester contre le massacre perpétré contre leur peuple, alors quel sens a cette citoyenneté israélienne contrefaite, truquée, à l’intérieur d’un Etat « juif démocratique » ?

Au moment de la publication de cet article, la police n’avait pas encore donné sa réponse.

Source : Journal M. Collon

Walla, 1er janvier 2008
* Eilat Maoz est la coordinatrice générale de la Coalition des Femmes pour la Paix . Fadi Shabita préside le mouvement Sadaka-Reut .
(Traduction de l'hébreu : Michel Ghys)