En droit de la guerre, la
césure reste l’Allemagne nazie. Les conventions internationales
qui traitaient de la guerre, datées de 1899 et de 1907,
concernaient essentiellement les soldats, et de manière
indirecte les populations civiles. Avec les nazis, l’ordre des
choses s’est inversé : la mort des civils est une réalité, et un
but de la guerre.
D’où une première réaction, avec l’article 6 du statut du
Tribunal de Nuremberg de 1945. Le crime de guerre est défini
comme une violation grave des lois et coutumes de la guerre
commise durant un conflit armé. L’article liste : « Assassinat,
mauvais traitements ou déportation pour des travaux forcés, ou
pour tout autre but, des populations civiles dans les
territoires occupés, assassinat ou mauvais traitements des
prisonniers de guerre ou des personnes en mer, exécution des
otages, pillages de biens publics ou privés, destruction sans
motif des villes et des villages, ou dévastation que ne
justifient pas les exigences militaires. »
S’est imposée ensuite la volonté de pérenniser cet acquis, et ce
fut l’œuvre des conventions de Genève, dont la 4°, relative à la
protection des personnes civiles en temps de guerre, conclue le
12 août 1949 et ratifiée à ce jour par 194 Etats dont Israël. La
convention reprend la référence aux violations graves du droit
de la guerre, et les liste en son article 147 : « L'homicide
intentionnel, la torture ou les traitements inhumains, y compris
les expériences biologiques, le fait de causer
intentionnellement de grandes souffrances ou de porter des
atteintes graves à l'intégrité physique ou à la santé, la
déportation ou le transfert illégaux, la détention illégale, le
fait de contraindre une personne protégée à servir dans les
forces armées de la Puissance ennemie, ou celui de la priver de
son droit d'être jugée régulièrement et impartialement selon les
prescriptions de la présente Convention, la prise d'otages, la
destruction et l'appropriation de biens non justifiées par des
nécessités militaires et exécutées sur une grande échelle de
façon illicite et arbitraire. »
Et l’article 146 précise que les Etats signataires « s'engagent
à prendre toute mesure législative nécessaire pour fixer les
sanctions pénales adéquates à appliquer aux personnes ayant
commis, ou donné l'ordre de commettre, l'une ou l'autre des
infractions graves à la présente Convention ». Les Etats
signataires acceptent l'obligation de « rechercher les personnes
prévenues d'avoir commis, ou d'avoir ordonné de commettre, l'une
ou l'autre de ces infractions graves, et elle devra les déférer
à ses propres tribunaux, quelle que soit leur nationalité. » Et
oui, la responsabilité est personnelle, et les Etats doivent
poursuivre les personnes responsables de crimes de guerre
dépendant de leur autorité.
Alors, chacun peut avoir l’analyse qu’il veut des évènements de
Gaza, dans leurs implications militaires, diplomatiques, et de
politique interne. Ce n’est pas mon propos.
En revanche, il y a des réalités objectives qui sont sous nos
yeux. Je précise que si Israël contrôle les images, la chaîne Al
Jazzera diffuse toute l’information suffisante pour dire
l’évidence : Israël commet ces jours-ci des crimes de guerre à
Gaza.
Et il y a récidive. La convention de 1949 sanctionne également à
l’article 49 la construction de colonies dans des terres
occupées, et à l’article 53 la destruction de propriétés en
l’absence d’impératifs militaires. L’installation des colonies
et l’édification du mur en territoire palestinien sont ainsi
contraires à la convention, comme la Cour internationale de
Justice l’a affirmé dans un avis du 9 juillet 2004. Et le
massacre de Sabra et Chatila en septembre 1982 – pour ne citer
que lui - n’a encore jamais été jugé.
Alors j’entends déjà : mais c’est le Hamas qui a commencé ! et
que faites-vous des tirs de roquettes sur Sderot ! et
Condoleezza Rice qui impute la responsabilité au Hamas ! et
Mahmoud Abbas qui déplore la rupture de la trêve ! et les forces
de tous les dangers qui soutiennent ce Hamas ! et ce Hamas qui
divise le monde arabe…
Ce n’est pas le problème. Israël n’a pas le droit de fouler au
pied la convention qu’il a signée. Convention qui, pour que les
choses soient bien claires, indique qu’elle est rédigée pour les
temps de guerre, et que les règles fixées ne peuvent être
remises en cause pour des motifs de sécurité.
L’armée d’Israël est forte, mais elle viole le droit
international. Auteur de crimes de guerre, le gouvernement
d’Israël, conduit par un homme destitué pour cause de
corruption, en sursis car les forces politiques sont dans
l’incapacité de former une coalition majoritaire, s’enfoncent
dans la violence sans être capable d’offrir la moindre solution
diplomatique.
30.12.2008
Source: journal M.
Collon
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